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André Füzfa : l’aventure scientifique, une expérience qui se partage

Auteurice de l’article :

Laetitia Theunis

Chimiste et océanographe de formation, Laetitia a troqué son tablier de chercheur contre une plume de journaliste par passion pour la vulgarisation scientifique. Elle a fait ses armes au Soir, avant de rejoindre le Vif et de devenir rédactrice en chef du Daily Science. Adepte de la randonnée et de la cuisine sauvage, elle aime s'immerger dans la nature et sortir des sentiers battus.

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Son métier, c’est sa passion. Et ce que l’astronome et physicien André Füzfa aime par-dessus tout, c’est communiquer les connaissances au public, avec humilité.

La diffusion des sciences, c’est son crédo. André Füzfa est un scientifique de haut vol qui veut rendre les connaissances accessibles au plus grand nombre. Titulaire d’un doctorat en sciences physiques, professeur à l’UNamur, il effectue des recherches scientifiques sur la propulsion à énergie dirigée pour voyager dans l’espace. Hyperactif, amoureux des planètes et des étoiles, il voit, en 2019, le fruit d’efforts menés depuis de longues années se concrétiser :  l’Observatoire astronomique Antoine Thomas s.j. ouvre ses portes sur les toits de l’université namuroise. De quoi permettre une observation d’une très grande qualité du ciel, même au cœur de la ville.

S’initier à l’astronomie

La coupole d’une tonne soulevée à plus de vingt mètres de haut est entièrement automatisée. « À l’intérieur se tiennent des instruments de pointe, comme un télescope solaire de grand diamètre, unique en Wallonie, permettant d’observer en toute sécurité les phénomènes éruptifs à la surface du Soleil », explique, enthousiaste, le pilote du projet. Un dispositif d’imagerie révèle, en quelques minutes, les principaux objets du ciel profond en filtrant la pollution lumineuse. Un télescope à fort grossissement permet quant à lui d’observer la Lune, les planètes et les petits objets du ciel. 

Découvrir les merveilles célestes est une expérience inoubliable pour qui ose s’y plonger, surtout dans cet Observatoire qui se veut résolument pédagogique. « J’y rencontre un large public. Partager mes connaissances est un véritable plaisir. Et cela me fait progresser également,  car les participant·es me posent des questions ou me font des remarques qui me permettent de continuer sur mon propre cheminement. C’est mutuellement profitable. »

Rencontre entre arts et sciences

L’Observatoire, c’est un lieu de médiation scientifique et culturelle ouvert à toutes et à tous. C’est ainsi que, depuis 2021, il est le siège d’une résidence Art & Sciences menée sous l’impulsion du KIKK, association qui promeut les cultures numériques et créatives aux croisements entre art, culture, science et technologie. 

Au cours de l’été 2023, André Füzfa a travaillé avec Louise Charlier, une artiste belge plasticienne. Lorsque celle-ci s’est, par après, rendue en résidence à l’ESOC (Centre européen des opérations spatiales), à Darmstadt en Allemagne, elle l’a invité à participer à un riche panel de réflexion sur les arts et la science. Il a pu y constater les différences d’approche entre monde artistique et monde scientifique, mais aussi des similarités en termes de validation de leur produit : œuvre artistique ou résultat scientifique. 

« Quand je coopère avec des artistes, je sais que je vais avoir face à moi des gens qui se posent des questions pertinentes et profondes sur le réel. Qu’iels vont me remuer et me sortir de ma zone de confort, car iels ne le font pas avec les mêmes méthodes que moi. Il faut s’adapter à une autre façon de penser, apprendre à se parler, comme c’est le cas avec des scientifiques d’une autre discipline. Cela ouvre grandement l’esprit. »Et parfois, cette collaboration aboutit à un outil qui rend de remarquables services. En 2021, Lucien Bitaux était en résidence à l’Observatoire. « Cet artiste s’intéressait aux défauts des optiques et aux artefacts dans les images. En mêlant nos façons de voir les choses, nous avons conçu un objet permettant d’aligner les miroirs d’un télescope en à peine 10 minutes, alors qu’auparavant cela prenait plusieurs heures avec un gros risque de se planter. Nous sommes allés le découper dans du PVC avec la découpeuse laser du TRAKK. Et je m’en sers toujours aujourd’hui ! »

Le plaisir de créer

À force de côtoyer des artistes, André Füzfa s’est, lui aussi, laissé tenté par une expérience artistique. Voilà un an, sortait son premier roman, « À l’appel des étoiles ». Paru en auto-édition, « pour être davantage libre », l’ouvrage est à classer dans le domaine de la science-fiction éducative. 

« Il y a un vrai plaisir à se laisser aller à une telle approche créatrice. Je m’éclate à faire ça. C’est tellement gai quand tous les ressorts de l’intrigue se mettent en place. Que ça coule de source. Que les dialogues et les situations s’enchaînent. Ça fait vraiment du bien. Il y a là un ressenti similaire à ce que l’on peut vivre lors de l’écriture d’articles scientifiques, quand les idées s’alignent et que tout devient clair, quand on se laisse emporter par le flot. »

Des talents de vulgarisation

« À l’appel des étoiles » est un récit basé sur les connaissances actuelles en astrophysique, en astronomie, en intelligence artificielle, en physique théorique. Non, surtout ne fuyez pas ! L’ouvrage se veut résolument accessible et didactique. Ces notions scientifiques, qui peuvent de prime abord paraître ardues, sont décomplexifiées par le talent de vulgarisation d’André Füzfa. Il a d’ailleurs été récompensé pour cette compétence en 2013, par un prix Wernaers. 

« Dans ce roman, on apprend plein de choses. Notamment à lire le ciel nocturne, car l’héroïne pilote le vaisseau spatial à l’aide de la carte céleste, en repérant les constellations. En trame de fond, se tient le voyage interstellaire relativiste : les effets de dilatation du temps sont expliqués. Des points de physique des trous noirs sont également abordés. »

Haro sur le transhumanisme

« Si la fiction est un très chouette domaine pour apprendre des choses sur le réel, elle est aussi un bel outil pour partager des interrogations, pour dénoncer. » Notamment le transhumanisme. André Füzfa n’a pas beaucoup d’estime pour ce courant de pensée selon lequel les capacités physiques et intellectuelles de l’être humain pourraient être accrues grâce au progrès scientifique et technique. 

« Dans mon livre, un mégalomane tordu a l’idée de détourner le voyage interstellaire pour prolonger sa vie. Et va tout faire pour la mettre en place. Cela permet de s’interroger : quel est le genre de personnes qui voudraient prolonger leur vie jusqu’à 150 ou 200 ans à tout prix, au détriment des autres humain·es, des ressources énergétiques, de l’éthique ? »

Scientifique féministe

Des interrogations fondamentales sur la nature de la gravitation, déjà amorcées dans ce premier livre, seront poursuivies dans la suite, qu’André Füzfa est en train d’écrire. 

« Au-delà de l’univers spatial, et des questions sur le pillage des ressources dans le Système solaire, le thème central de ce tome 2, c’est le féminisme. De par ma condition, je ne peux pas être un porte-parole du féminisme. Mais c’est un sujet qui me parle et qui, je pense, est important, même pour les hommes blancs de la quarantaine…, parce que ça touche tout le monde. C’est bien plus qu’un problème de genre, c’est un problème de vision du monde et de rapport entre les gens. Le féminisme, c’est une cause qui est juste », conclut André Füzfa.

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