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WID Summit : l’empowerment des femmes dans la créativité numérique

Auteurice de l’article :

Laetitia Theunis

Chimiste et océanographe de formation, Laetitia a troqué son tablier de chercheur contre une plume de journaliste par passion pour la vulgarisation scientifique. Elle a fait ses armes au Soir, avant de rejoindre le Vif et de devenir rédactrice en chef du Daily Science. Adepte de la randonnée et de la cuisine sauvage, elle aime s'immerger dans la nature et sortir des sentiers battus.

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Pour sa première édition, le Women in Digital Summit a fait carton plein. Organisé au TRAKK à Namur, il a rassemblé des femmes inspirantes œuvrant dans le domaine de la créativité numérique. Et a ouvert le champ des possibles aux nombreux·se participant·es.

Sans conteste, la première édition du Women in Digital (WID) Summit a été un succès. Plus d’une centaine de personnes, principalement des femmes, ont assisté, le 16 mai 2024, à de multiples activités visant à promouvoir la place des femmes dans le monde des arts et du numérique. Et dans l’assemblée, des étoiles ont fait briller de nombreux regards. 

«  La créativité numérique, c’est un enjeu important pour féminiser davantage les métiers et le marché de la tech. Proposer une telle journée mettant en avant les métiers de cette industrie, mais aussi des femmes qui s’y expriment avec talent, permet d’apporter une visibilité à l’écosystème wallon de la créativité numérique. Et ce, afin que d’autres femmes puissent se dire : c’est peut-être pour moi. Mais aussi pour lever les barrières liées, souvent, aux aspects techniques de ces métiers », explique Delphine Jenart, coordinatrice de Wake! By Digital Wallonia, la nouvelle communauté de la créativité numérique lancée en janvier par le KIKK, ASBL qui explore les intersections entre art, sciences, technologies et société.

« Cette première édition du WID, on la voulait à la fois inspirante et pratique, explique Marine Haverland, coordinatrice du WID. C’est pourquoi la journée a été assez riche et variée : en parallèle des conférences et des tables-rondes, se sont tenus des workshops sur des connaissances techniques, comme une introduction à Midjourney et au self branding en ligne,  ainsi que des coachings sur des soft skills. » Notamment les façons de donner et de recevoir du feedback. De quoi repartir chez soi avec de nouvelles cordes à son arc. C’est en tout cas l’avis d’une des participantes au coaching “comment présenter votre projet à un organisme financier?” donné par St’art Invest. « C’était génial, j’ai beaucoup appris. Je me sens davantage en confiance pour monter mon projet », dit-elle tout sourire en se dirigeant vers un autre atelier.

Des jeux vidéos à gogo

Niveau inspiration, la barre a été placée directement près des étoiles. Du haut de ses 30 ans, Mélanie Courtinat, qui se définit comme directrice artistique immersive et artiste contemporaine basée à Paris, est venue expliquer son parcours sans langue de bois. Revenant sur les difficultés rencontrées, sa foi en son travail, les opportunités qu’elle a su relever. Et, sur base de ses expériences, elle a révélé ses astuces pour gagner honnêtement sa vie dans le domaine des arts numériques. Tout au long de son exposé, les carnets des participant·es se sont noircis de notes, tant il était inspirant.

© Louise Adelbrecht

« La particularité de mon travail est que je crée exclusivement sur ordinateur. Je suis passionnée par les moteurs de jeux vidéos. J’utilise des logiciels comme Unity pour créer des jeux vidéos, de la réalité virtuelle, augmentée, mixte. Je crée aussi des images et des films en 3D. A raison de 40 % de mon temps environ, je crée des œuvres d’art qui voyagent dans le monde entier à travers des musées, institutions, festivals, galeries d’art, selon un modèle économique classique de l’art contemporain. »

« En parallèle, depuis 2017, je travaille dans le cadre de projets commerciaux commissionnés pour des marques ou des intervenant·es, comme Dior, Dolce&Gabbana, Jean-Paul Gaultier, Cartier etc. Dans le monde du luxe et de la mode, il y a une sorte de curiosité et d’appétence pour les nouvelles technologies. Et le jeu vidéo s’y prête à merveille. Travailler pour les marques, c’est toujours raconter une émotion. C’est aussi aller très loin dans la création artistique personnelle, accepter des dizaines d’aller-retour avec lae client·e et de nombreux compromis.» Et les exemples de résultat, projetés sur le grand écran de la salle plénière du TRAKK, sont d’une beauté à couper le souffle. 

Le monde de la musique vient aussi vers Mélanie Courtinat pour réaliser des clips vidéos. Comme ce fut le cas avec le groupe Agar-Agar, qui lui a laissé une totale liberté artistique. Mais aussi avec Dixon, un célèbre DJ de house music, pour qui elle a créé Nei, un avatar qui se trémousse sur une barre de pole dance. « C’est complètement dingue que ce que j’ai créé chez moi soit finalement visible sur un écran géant par 11.000 personnes », s’émerveille l’artiste numérique. Elle crée aussi des face filters. « Mon modèle économique, c’est beaucoup de bricolage. J’apprends beaucoup sur le tas, en fonction des commandes. Et je veille à ce que mes compétences technologiques restent constamment à jour. »

Des places à prendre

Pas moins de 16 évènements étaient programmés tout au long de la journée, à raison de 4 qui se donnaient de façon simultanée. Et les sujets avaient tous l’air intéressants. Choisir, c’est renoncer… Mais Pauline Antoine, alias Poney, illustratrice au divin coup de crayon, a sauté de salle en salle pour croquer les événements de la journée. «J’ai assisté un petit peu à tout pour vous faire un petit résumé de ce que vous avez loupé», lance-t-elle dans l’agora tout en faisant défiler sur grand écran ses dessins aux personnages à la tête démesurée, en les accompagnant de commentaires remplis d’humour.. Sur le temps de midi et en fin de journée, elle nous a ainsi offert une bonne tranche de rire, tout en dévorant un sandwich végé ou en vidant un gobelet de café. 

Vite, on file dans l’une des salles du sous-sol du bâtiment. On y débat de l’écosystème wallon dans le domaine des effets visuels cinématographiques (VFX) et de l’animation. Et celui-ci n’a pas à rougir tant il est riche. 

Des représentantes des entreprises Benuts, Dreamwall et Digital District sont venues discuter de la place des femmes dans ce monde particulier. Et le constat est clair, il y en a trop peu. Une raison principale invoquée est que les femmes ne sont pas au fait de ces métiers. C’est pourquoi les trois entreprises présentes à la table-ronde organisent des portes ouvertes, font visiter leurs studios aux écoles, mettent en avant les femmes qui y travaillent à différents postes. Et ce, en espérant attirer les jeunes filles et les femmes en reconversion professionnelle et leur faire découvrir une profession enviable qui leur est tout à fait accessible. « Nous allons dans les écoles pour conscientiser les jeunes à notre domaine d’activité. On accueille également des stagiaires », explique Stéphanie Pottier de Benuts.  

Vient la question sempiternellement posée : comment se former à ces nouveaux métiers ? Il y a, bien sûr, les trajectoires classiques en université ou haute école. Mais d’autres acteurices de la formation tirent leur épingle du jeu. C’est le cas d’Interface 3. Basée à Bruxelles, cette ASBL forme exclusivement des femmes, notamment aux métiers du numérique. Chaque année, près de 300 d’entre elles, d’un âge compris entre 25 et 40 ans, participent à l’une de ses 13 formations longues, qualifiantes et gratuites, avec un taux d’insertion professionnel de 70 à 80 % ! 

A l’instar d’entreprises wallonnes actives dans les technologies immersives visant à dépoussiérer les musées, telles qu’Hovertone, « le domaine du VFX et de l’animation est clairement en pénurie de talents. L’avantage de la pénurie, c’est que nous sommes obligé·es d’être de bon·nes employeur·euses. Cela signifie d’être très agiles dans la flexibilité du travail, le télétravail, l’agencement vie privée/vie professionnelle », ajoute Alice Gorissen, CEO de Dreamwall. 

« Il est très important de permettre aux entreprises d’évoluer quant à leur culture. Par exemple, d’arrêter de faire une réflexion aux mamans qui vont chercher leur enfant à 17h à l’école en leur disant « ah tu prends ton après-midi ? ». En effet, s’il s’agit, dans un premier temps, d’attirer les femmes vers les carrières numériques, il faut aussi que des conditions favorables soient mises en place pour les y maintenir », pointe Maryse Colson de Elles bougent, une association franco-belge visant à attirer les femmes vers les filières et carrières scientifiques et techniques.

© Louise Adelbrecht

Après cette journée riche en rencontres et activités inspirantes, le rendez-vous est déjà pris au printemps 2025 pour une deuxième édition du WID Summit. « Cette édition-ci était quasiment 100% féminine, avec l’idée de donner un maximum la parole aux femmes. L’année prochaine, il y aura une réflexion sur comment travailler avec les hommes qui souhaitent porter notre message d’inclusion des femmes dans les domaines numériques. Sur comment les outiller aussi, parce qu’ils sont demandeurs », conclut Delphine Jenart. On a déjà hâte d’être l’an prochain!

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