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Emilie Fockedey, la technologie au service de l’humain

Auteurice de l’article :

Laetitia Theunis

Chimiste et océanographe de formation, Laetitia a troqué son tablier de chercheur contre une plume de journaliste par passion pour la vulgarisation scientifique. Elle a fait ses armes au Soir, avant de rejoindre le Vif et de devenir rédactrice en chef du Daily Science. Adepte de la randonnée et de la cuisine sauvage, elle aime s'immerger dans la nature et sortir des sentiers battus.

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De la technologie déshumanisée, la co-responsable du programme wallon en intelligence artificielle n’en veut pas. Elle axe son action sur la sensibilisation des citoyen⸱nes et des industriel⸱les à l’IA et à ses enjeux. Et ce, afin de leur fournir les outils pour choisir en conscience d’y avoir recours ou pas.

La technique et la technologie, Emilie Fockedey en raffole. Un peu avant que la pandémie et son cortège de confinements ne chamboulent nos vies, elle pressent que le monde est sur le point de changer en profondeur avec l’avènement de l’IA. “C’était attrayant, mais je n’y connaissais pas grand-chose. C’est alors qu’une amie m’annonce qu’elle se lance dans le certificat interuniversitaire “Hands on AI” donné à l’UMons en horaires décalés. Et là, je me dis : et si je le faisais moi aussi ? Comme j’aime apprendre et suivre des cours, retrouver les amphis, c’était joindre l’utile à l’agréable. En plus, le cursus était riche et varié. Avec notamment des conférences sur l’impact de l’intelligence artificielle dans l’éducation et la santé, domaines qui m’intéressent beaucoup. Mais aussi un côté « mains dans le cambouis », avec un apprentissage de la programmation en python.”

Mettre la technologie au service de l’humain 

Elle se lance dans cette formation en 2019 sans savoir qu’en faire au niveau professionnel, mais en étant certaine que ce ne serait pas inintéressant pour sa carrière. A l’époque, elle est responsable de Move Up, un programme d’accélération pour start-up numériques. Trois ans plus tôt, elle suivait une formation en coaching. Et la valorisait en accompagnant des jeunes pousses pour différentes organisations comme CAPInnove, Digital Attraxion ou l’Agence du Numérique. “Combiner les aspects humains et technologiques, c’était déjà ce qui me bottait à l’époque.” 

Quelque temps après l’obtention de son certificat montois en IA, elle voit passer sur Linkedin une annonce de recrutement pour co-gérer le programme wallon en intelligence artificielle, et se dit qu’il n’y a pas de hasard. Une lettre de candidature envoyée et la voilà qui décroche le job. 

“Actuellement, il y a, au sein de notre pays, de grandes réflexions et de grandes craintes suscitées par l’intelligence artificielle. Ma vision de la technologie, c’est qu’elle est là pour améliorer le quotidien de l’humain⸱ne. Pour lui faciliter la vie, accroître son bien-être, sa qualité de vie. Pour l’aider à se développer, à grandir. En aucun cas, la technologie ne doit servir à emprisonner l’humain⸱ne, à lui nuire.”

“En tant que responsable du programme wallon en intelligence artificielle, je ne suis pas pour mettre de l’IA dans tous les domaines. Cela dépend de l’entreprise. Pour certaines, avoir recours à l’IA, c’est crucial, alors que pour d’autres ce n’est pas important. Cela doit rester un choix conscient et éclairé des personnes impliquées : il faut qu’elles comprennent bien les enjeux, les risques, les opportunités de l’IA.”

Un café de l’IA

Travailler dans la technologie, pour Emilie Fockedey, ce n’était pas un rêve d’enfant. “Jusqu’en rhétos, je ne savais pas ce que je voulais faire comme études supérieures. J’hésitais entre les langues orientales, la diplomatie, le droit international, les sciences. J’adorais les maths. Je me suis dit que si je devenais ingénieure civile, ça ne me fermerait pas de portes. C’est ainsi que j’ai démarré dans cette filière, et j’ai vraiment beaucoup aimé mes études. Mais attention, la technique pure ne m’intéresse pas. Ce que j’aime, et j’ai la chance de le faire dans mon métier, c’est allier le volet technique et technologique avec le volet humain.”

Comme prochain grand chantier, Emilie Fockedey aimerait intensifier la sensibilisation citoyenne autour de l’IA. “D’ici 2025, l’idée est d’organiser un café itinérant de l’intelligence artificielle. Ce moment d’échange permettrait aux citoyen⸱nes de rencontrer des expert⸱es et de leur poser les questions qui les taraudent au sujet des nouvelles technologies. Iels pourront aussi exprimer leurs peurs, car c’est normal qu’il y en ait. Souvent, il s’agit de la peur de l’inconnu. Il important que les expert⸱es puissent apporter des réponses pour démystifier l’IA et les usages qui en sont faits.”

Un autre projet trouve ancrage dans les nouvelles réglementations européennes encadrant l’intelligence artificielle. “Il s’agira de fournir aux entreprises, via des vidéos et d’autres ressources disponibles librement sur notre site web, toute une série d’informations fiables pour qu’elles sachent ce qu’elles doivent faire et ce qu’elles ne doivent pas faire. Et puis, évidemment, si elles ont des questions avec des cas spécifiques, des spécialistes leur répondront.”

Thriller et musique classique

Avec un tel parcours, on pourrait s’attendre à ce qu’Emilie Fockedey soit une aficionada de science-fiction. Il n’en est rien. Un bon roman policier, des affaires criminelles à résoudre sur fond de thriller, voilà ce qu’elle aime lire pour se changer les idées. Et ne lui parlez pas de visionner un long film après une journée de boulot, au risque de la voir piquer du nez bien avant le générique de fin. “Par contre, j’apprécie les séries”, sourit-elle. 

La musique a également une place de choix dans sa vie. Particulièrement la musique classique. “J’ai commencé le piano à l’âge de 9 ans. Et cela ne m’a plus quittée. Si j’ai perdu en technique, suite à un manque d’entraînement, j’apprécie toujours autant jouer. J’aime aussi écouter des concerts classiques chez moi. Ce genre de musique permet de s’évader tout en transmettant des émotions. Ce cocktail incroyable peut me toucher au cœur et beaucoup m’émouvoir. Il m’arrive aussi d’écouter un⸱e pianiste en travaillant. L’absence de paroles me permet de me concentrer sur ce que j’ai à faire.”

Le sport et la force du mental

Pour relâcher la pression, ou débuter une journée d’une agréable façon, elle chausse ses baskets. De la musique ou un podcast dans les oreilles, c’est parti pour une quarantaine de kilomètres hebdomadaires de course. Sur route, mais aussi de plus en plus souvent en mode trail. « Lors du jogging, mon esprit divague, ça me fait beaucoup de bien. Je fais aussi du vélo, d’appartement pour l’instant, dans l’idée de réaliser un jour un triathlon. Pour accomplir ce challenge, il faudra donc que je pense à me mettre prochainement à la natation.»

Ce ne sera pas son premier défi sportif. Emilie Fockedey fait, en effet, partie de la famille des marathonien⸱nes. « J’en ai déjà couru un. Ce que j’adore dans le sport de haut niveau, c’est la force du mental. Je me rappelle ces matchs de tennis, où un⸱e joueur⸱euse qui est mené⸱e par son adversaire, qui subit des balles de match contre ellui, va réussir à trouver les ressources en ellui pour retourner la situation et reprendre l’ascendant. Je trouve ça juste phénoménal. Ça m’inspire énormément ! »

Elle aurait aimé rencontrer Kelvin Kiptum. Étoile filante de l’athlétisme et recordman du monde du marathon, il est décédé dans un accident de voiture en février de cette année. « Il alliait excellence et dépassement de soi. On le pressentait comme médaillé d’or olympique. Il était hyper impressionnant. » De par ses ambitions et son engagement pour une technologie au service de l’humain, Emilie Fockedey est, elle aussi, impressionnante.

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