Meet & Build à Charleroi : le carrefour du gaming wallon et international
Auteurice de l’article :
Les 24, 25 et 26 octobre derniers, le Quai 10 de Charleroi accueillait la 9e édition du Meet & Build. Bien qu’il reste plus modeste que les grands salons tels que la GDC ou la Gamescom, l’événement organisé par Walga attire de plus en plus de monde et suscite un enthousiasme croissant pour le gaming wallon.
Il est 10 h du matin, on arpente les quais de Charleroi sous un temps ensoleillé mais frais. C’est notre première fois au Quai 10, où se tient le Meet & Build. En chemin, notre GPS nous avertit que “l’endroit est plus fréquenté que d’habitude”. Arrivés à destination, on comprend pourquoi : bien qu’on soit tôt, l’événement bat déjà son plein.
Le Quai 10 regroupe une brasserie moderne et accueillante, un complexe de cinéma avec plusieurs salles, ainsi qu’un espace dédié aux jeux vidéo. Nous nous dirigeons vers la brasserie, déjà bien animée. Certaines personnes travaillent sur leur ordinateur portable, mais la plupart discutent avec enthousiasme. Rien de plus logique, car le Meet & Build est avant tout un lieu de rencontre et de partage, comme l’explique Laure Marlière, chargée de communication chez Walga, l’organisateur de l’événement : “Le Meet & Build est un petit événement où l’on reste proche des gens, où l’on essaie de construire ensemble. Les mots “Build” et “Meet” sont les piliers de ce que nous cherchons à créer. L’objectif est de bâtir quelque chose de solide avec toustes les participant·es, et de faire perdurer cette relation par la suite. C’est vraiment cet aspect de connexion suivie qui est important. Notre événement se distingue des grands salons comme la GDC ou la Gamescom, où les rencontres sont rapides, presque à la chaîne, et où il est difficile de nouer des relations durables. Avec le Meet & Build, l’accent est mis sur la construction d’une relation de confiance, presque intime, avec les développeur·euses belges et les invité·es.”
Parmi les participant·es, on retrouve de nombreux développeur·euses de la région wallonne. Nous croisons notamment l’équipe de Mystal Games, un studio indépendant dirigé par Manihel Foucart, Joackim Foucart et Karima Jamil. Bien qu’habitué·es aux événements internationaux, iels tiennent à être présent·es ici à Charleroi : “Il ne faut pas négliger les événements plus spécialisés, plus centrés et locaux, qui peuvent aussi être bénéfiques pour les petits projets. Ils permettent aux porteur·euses de projets de se faire connaître et d’accéder à de nouvelles opportunités. Je pense qu’il est important de viser à la fois les grands et les petits événements”, explique Karima.
Manihel ajoute : “Ces rencontres permettent aussi de rassembler les studios wallons, de se voir et de discuter de nos progrès. Cela nous met aussi en contact les un·es avec les autres, ainsi qu’avec d’autres studios, partenaires, investisseur·euses et éditeur·euses. C’est très important d’avoir ce type d’événement en Belgique”.
Un événement qui attire les acteurices internationaux·ales
Mais le Meet & Build n’est pas seulement un événement belge. Dans les salles de cinéma du Quai 10, de nombreuses conférences sont animées par des développeur·euses, éditeur·euses et consultant·es du jeu vidéo venu·es de divers horizons. Parmi les délégations présentes, on retrouve le Japon – pays pionnier du jeu vidéo –, la Grèce, la Croatie, ou encore les Philippines.
L’Afrique est également présente au Meet & Build. Longtemps délaissé par l’industrie du jeu vidéo, le continent africain, avec son histoire et sa culture, occupe aujourd’hui une place de plus en plus importante.
Mais l’intégrer nécessite une approche authentique, comme l’explique Jennifer Lufau, consultante en authenticité pour les studios de jeux vidéo, venue spécialement de Paris : “Je pense que l’Afrique est la prochaine grande opportunité créative à mettre en avant dans les jeux vidéo, car elle est vraiment sous-représentée. Il faut en profiter, mais il est essentiel de le faire correctement. Le constat, c’est que les studios manquent de diversité en général, avec peu de femmes et de diversité d’origine. Donc, si l’on veut raconter des histoires issues d’autres cultures, il est important de s’entourer de personnes qui connaissent le sujet. Il faut éviter de mal représenter ces cultures, car cela serait dommage de produire des jeux qui les déforment”.
Pour elle, cette occasion de transmettre son message en Belgique est une première. Elle dit avoir observé que notre pays commence doucement à se faire une place dans l’industrie, bien qu’il reste encore un acteur mineur :
« Je pense que je n’ai pas encore rencontré suffisamment de délégations belges dans les grands événements de jeux vidéo en France. Elles sont présentes, mais j’ai l’impression qu’on n’entend pas encore suffisamment parler de la Belgique dans l’industrie. Pourtant, je sais qu’il se passe beaucoup de choses ici, et qu’il y a de nombreuses opportunités qui sont en train de se développer dans le secteur du jeu vidéo. »
La Wallonie, terre de gaming en pleine expansion
Et pourtant, en Wallonie, la visibilité des studios de jeux vidéo progresse. Pour Corentin De Clercq, fondateur de Little Big Monkey Studio, l’expansion du gaming made in Wallonie est même indéniable : “Oui, ces dernières années, ça se développe pas mal avec les projets montés un peu partout, les centres de formation et les écoles spécialisées comme Albert Jacquard. On voit de plus en plus de petites structures émerger. Il faut aussi reconnaître que Walga rassemble de mieux en mieux tous les studios sous une même bannière, et ça, c’est super. Jean Greban, qui en est à l’origine, a fait un énorme travail pour établir des contacts à travers le monde et promouvoir les jeunes studios wallons.”
Si Walga joue un rôle central en matière de visibilité, des plateformes comme Wallimage offrent aussi un soutien précieux. Sophie Augurelle, chargée du département gaming, explique : “Avec la crise actuelle (plus de 30 000 suppressions d’emplois dans le secteur mondial ces deux dernières années), l’influence des éditeurs a changé. Aujourd’hui, ils sont plus frileux. Les studios doivent donc trouver des plans B pour financer leurs productions, souvent très coûteuses”.
Et les jeunes studios peuvent compter, entre autres, sur Wallimage pour ce soutien essentiel : “Le financement public a joué un rôle crucial dans ce développement. Au cours des deux dernières années, nous avons soutenu des projets qui n’auraient peut-être jamais vu le jour sans l’aide de Wallimage”.
Des avancées à poursuivre
Cette dynamique est toutefois en suspens suite aux récentes élections qui revoient les subventions du gouvernement wallon : “La subvention que nous avons obtenue pour les appels à projets jusqu’à cette année faisait partie du plan de relance de la Wallonie, au même titre que de nombreux autres projets. Le gouvernement a jusqu’à la fin de l’année pour décider de ceux qui seront retenus”, explique Sophie Augurelle.
Malgré cette incertitude, Walga continue de préparer l’avenir des studios wallons. Laure Marlière conclut : “notre objectif est de bien représenter le secteur. Cela passe par notre participation à des événements internationaux mais aussi par des initiatives locales pour fédérer les développeur·euses wallon·nes. Cela inclut des rassemblements réguliers comme les Game Dev Café à Mons, les Game Dev After Work à Charleroi, ainsi que des Game Café à Namur et à Liège, où nous avons également quelques événements prévus. Donc pour le moment, pas question de se reposer !”.
De quoi encore faire décoller la visibilité du gaming wallon et permettre, pourquoi pas, la consécration mondiale d’un premier jeu développé chez nous !
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