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What The Hub ?

Auteurice de l’article :

Cassi Henaff

Cassi ou Cassiopée (pour les très intimes) \ nom propre : prénom féminin \ Synonyme : couteau suisse - Objet présentant des outils ingénieusement assemblés à un couteau pour tenir dans une poche et répondant à de multiples fonctions ; Femme un peu folle, passionnée par la combinaison de l’art et du numérique, pédagogue et féministe, engagée dans des projets porteurs de sens ; Animal qui n’a pas sa langue en poche ; Pile électrique qui ne sait pas choisir entre les burgers et les pizzas, qui marche beaucoup, mange beaucoup, rit beaucoup, et travaille beaucoup.

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Le Trakk, c’est ce qu’on appelle un hub créatif. C’est un point central, un système de pivot où se rejoignent les ICC, les industries culturelles et créatives. Mais si la définition n’est pas compliquée à appréhender en théorie, dans la pratique, les exemples existants sont tellement multiples qu’on s’y perd un peu.

On a donc décidé avec l’équipe de kingkong de faire le point sur la forme des hubs (l’architecture, le mobilier, les espaces) mais aussi sur le fond de ce qu’ils proposent, en termes de contenus, de valeurs, d’intentions, pour pousser les entreprises et start-ups à passer la porte de ces lieux post-industriels, qui paraissent parfois un peu inaccessibles.

Quand on demande autour de nous ce qu’est un “hub créatif”, les réponses sont multiples, floues et un peu mystérieuses.

  • heu… c’est du co-working non?
  • ah moi, j’pense que c’est un truc genre FabLab
  • ça me fait penser à des lieux créatifs avec des balançoires tendances…
  • Genre les locaux de Google quoi…

En bref, autant de réponses qu’il n’y a de personnes à qui on a posé la question. Du coup, avec l’équipe de kingkong, on s’est dit qu’il fallait qu’on fasse un peu de vulgarisation théorique parce que même nous, des fois, on s’y perd avec tous ces termes franglais qui tournent autour de l’innovation digitale, du numérique et de l’entreprenariat en 2023.

C’est quoi un hub créatif ?

Alors avant, on disait “Google est ton ami”. Aujourd’hui, on a demandé à… (roulements de tambours) : ChatGPT of course.

Un hub créatif, également connu sous le nom de centre créatif ou espace créatif, est un lieu physique ou virtuel conçu pour favoriser la collaboration, l’innovation et l’expression artistique. Il s’agit d’un espace où les individus créatifs de différents domaines peuvent se réunir, partager des idées, collaborer sur des projets et trouver l’inspiration.

Un hub créatif peut prendre différentes formes, selon le domaine d’activité et les objectifs spécifiques. Il peut s’agir d’un espace de travail partagé où des professionnels créatifs travaillent ensemble, d’un laboratoire d’innovation où des chercheurs et des entrepreneurs développent de nouvelles idées, d’un studio artistique où des artistes travaillent sur leurs projets, ou même d’une plateforme en ligne où des créateurs peuvent se connecter virtuellement.

Les hubs créatifs offrent souvent un environnement stimulant où les personnes peuvent échanger des connaissances, bénéficier de ressources partagées telles que des équipements et des outils, participer à des ateliers, des formations ou des événements, et établir des collaborations professionnelles. Ces espaces favorisent l’émergence de nouvelles idées, la créativité, l’expérimentation et l’innovation.

De nombreux hubs créatifs visent également à soutenir et à promouvoir les industries créatives locales, telles que les arts visuels, la musique, le cinéma, le design, la mode, les jeux vidéo et bien d’autres. Ils peuvent servir de plateformes pour la présentation et la commercialisation des œuvres créatives, ainsi que pour le développement de compétences entrepreneuriales dans le secteur créatif.

À la lecture de cette définition, on remarque d’abord que Chat GPT n’écrit pas encore en inclusif, too bad. Et puis, on y aperçoit quelques mots qui nous sautent aux yeux : espace créatif, collaboration, innovation, domaines, travail partagé, laboratoire, stimulant, industries créatives. Il faut donc comprendre les hubs créatifs tant dans leur forme (l’environnement, l’architecture, le mobilier) que dans leur fond (la philosophie, les missions, les activités).

Zoom sur la forme

On a cette image un peu fictionnelle des bureaux (des villes mêmes) de Google ou de Facebook en Californie – Vous aussi vous voyez Justin Timberlake dans le film The Social Network ? Non. Bon… Imaginez-vous des espaces super ouverts, architecture industrielle moderne, avec des plantes, des balançoires, des petites cases individuelles, des zones de jeux, des machines à café supersoniques, etc. Et même si cette représentation est certes stéréotypée, elle n’est quand même pas si loin de la réalité.

Alors, bien sur : ça surfe sur des tendances instagrammables (ou Pinterest ?). Mais l’architecture, le mobilier, la décoration (la forme quoi) sont des éléments indispensables pour favoriser la créativité et la collaboration. -Toi aussi tu te demandes comment des tableaux transparents, un babyfoot et une arène pleine de coussins encouragent l’innovation ?

©Alexine Somville

En réalité, tout est pensé pour briser la routine, inspirer de nouvelles idées. Et en proposant une diversité d’environnements différents, on s’assure que chaque lieu est prédisposé pour une certaine mission. Par exemple, mettre à disposition des espaces de jeux avec des fléchettes, des bornes d’arcade ou des consoles, ce n’est pas seulement pour être “in” (dites que vous êtes trentenaire sans le dire). D’abord, c’est pour créer une ambiance détendue qui réduit le stress et augmente la productivité, mais c’est d’autre part, délimiter son bureau comme un espace de travail et non de distraction.

Un truc que vous connaissez certainement et que vous entendez régulièrement, ce sont les espaces de co-working – T’inquiète pas, on va tout t’expliquer, c’est le but de ce dossier.

Le “co-working”, c’est ce mot valise composé de “coopérative” et de “working” : en bref, c’est le travail dans la coopération. Il faut imaginer des tables, des bureaux où personne n’a son espace fixe. Chacun·e s’installe où iel le sent, en fonction de son énergie mais aussi de l’énergie des autres. À nouveau, les espaces ouverts, grands, un mobilier flexible, un wifi performant et une organisation visuelle et structurelle spécifiques invitent les co-workers et co-workeuses à travailler en individuel mais à sortir de leur zone pour rencontrer et développer une forme de collaboration.

D’ailleurs, pour des personnes qui ont l’habitude de bureaux plus conventionnels, les hubs créatifs ressemblent plus à des cours de récréation qu’à des environnements de travail. Les espaces mis à dispositions incitent à des échanges informels essentiels à la créativité – Toi aussi t’as déjà entendu dire que dans les hubs créatifs, il y a souvent des FabLab. Well done !

©Pexels

Un FabLab (abréviation de Fabrication Laboratory), c’est un atelier équipé de machines à commande numérique, d’outils de prototypage, de logiciels de feu et d’autres technologies ultra modernes. On y retrouve souvent des imprimantes 3D, des découpeuses laser et vinyle, de scanners 3D aussi, de fraisage CNC et de tout un tas d’autres équipements électroniques pour la conception et la fabrication de circuits électroniques.

Du coup, les personnes qui poussent les portes d’un FabLab peuvent concevoir, développer, se faire accompagner, prototyper et fabriquer une grande variété de projets aussi innovants qu’inédits : au plug-R de Liège, on retiendra le dispositif GPS pour lunettes connectées, Louvain-la-Neuve a aidé au développement de Focus, le galet anti-stress pour les enfants qui ont besoin de faire face aux émotions ou encore Canari, développé au Trakk, une lampe qui représente visuellement la pollution.

Zoom sur le fond

Un peu comme la forme qui s’articule autour d’un double jeu entre flexibilité et structure, les hubs créatifs sont imaginés et fonctionnent sur un contraste entre des éléments qui peuvent paraître opposés mais qu’il faut plutôt envisager comme complémentaires.

Communauté >< Individu

Prenons l’exemple des FabLabs qu’on a évoqué juste précédemment. Le M.I.T (Massachusetts Institute of Technology), université de renommée mondiale, a imaginé une charte pour son FabLab. Depuis, les FabLabs qui sont labellisés comme tels doivent la suivre. On y retrouve des éléments de gestion interne (comme le fait d’être responsable, propre, de respecter le matériel, etc.) mais surtout, on y voit des intentions d’accès, d’éducation et de communauté :

Accès

Vous pouvez utiliser le FabLab pour fabriquer à peu près n’importe quoi (dès lors que cela ne nuit à personne) ; vous devez apprendre à le fabriquer vous-même, et vous devez partager l’usage du Lab avec d’autres usagers et utilisateursrices.

Éducation

La formation dans le FabLab s’appuie sur des projets et l’apprentissage par les pairs ; vous devez prendre part à la capitalisation des connaissances et à l’instruction des autres utilisateurices.

Business

Des activités commerciales peuvent être incubées dans les FabLabs, mais elles ne doivent pas faire obstacle à l’accès ouvert. Elles doivent se développer au-delà du Lab plutôt qu’en son sein et bénéficier à leur tour aux inventeurices, aux Labs et aux réseaux qui ont contribué à leur succès.

C’est exactement dans cette vision que les hubs créatifs existent : la notion de communauté est essentielle au même titre que les individus dans leur spécificité. Ça engendre :

  • premièrement, des synergies entre les individus qui y passent. En se connectant les un·es aux autres, iels peuvent discuter, échanger et combiner leurs compétences pour développer soit des projets communs, soit faire émerger de nouvelles initiatives pour leur projet personnel.
  • deuxièmement, de l’inspiration : au sein des hubs créatifs, on le disait, les espaces sont élaborés dans une vision de structure (je fais ça à tel endroit). Les espaces partagés sont donc des lieux d’interaction qui permettent à des personnes d’un secteur commun très vaste (ICC, industries culturelles et créatives) de s’inspirer mutuellement et de créer une dynamique motivante, encourageante et full de solutions.
  • troisièmement, un réseau professionnel : à la machine à café, ça discute et ça réseaute. Alors, c’est sûr que quand on commande le pokebowl du midi ou la bière de 17h, ça n’échange pas ses cartes de visite, mais ça cause boulot et ça permet justement de nouer des contacts, de remplir son carnet d’adresses et même de répondre à des besoins professionnels d’autres individus… et donc, de choper des opportunités.
  • quatrièmement, un sentiment d’appartenance et donc, de l’entraide. Une communauté, c’est aussi se sentir intégrés dans un lieu physique et dans une philosophie (qu’on développe en long et en large dans ce dossier).
  • dernièrement, un partage de connaissances, de compétences et d’expertise. Si chacun·e fait partie des ICC, chacun·e intervient avec ses propres connaissances et compétences qui deviennent complémentaires aux autres.

Autonomisation >< Suivi

Souvent, dans ces lieux créatifs, il y a plusieurs types d’individus qui passent les portes : les gestionnaires (celles et ceux qui font partie de la maison, qui sont engagé·es par le hub pour accompagner les porteurs et porteuses de projet, ces personnes qui aident à l’utilisation de la CNC ou des micros d’un studio de podcast), les résident·es (certains hubs proposent à des structures créatives d’installer des bureaux plus fixes) et les co-workers et co-workeuses qui viennent moins régulièrement, qui connaissent tout de même les espaces mais qui soit profitent de l’espace de… roulements de tambours bis, le co-working, soit les bureaux de rencontre par exemple (puis, il y a celles et ceux qui viennent taper convers sur un temps de midi… ou à l’heure de l’apéro). Dans les autres passager·ères, il y a aussi les individus qui viennent pour des évènements plus grands et moins spécifiques comme des moments de formation et de rencontre.

©Pexels

Cet état des lieux de la communauté, active à certains moments, permet donc de former une synergie entre tous les membres de ce groupe. Chacun·e avec son énergie, ses soft et hard skills comme on dirait aujourd’hui. C’est la rencontre de ces expériences qui vont permettre la collaboration et offrir la possibilité de monter en compétences pour devenir autonome dans sa pratique.

On a souvent cette image d’un formateur ou d’une formatrice qui va enseigner un savoir à un·e formé·e. Mais c’est une vision très verticale de l’apprentissage. Dans un hub créatif (et ça devrait se faire dans d’autres domaines), s’il y a de la théorie, c’est surtout dans la pratique que les projets se concrétisent. Les individus qui choisissent d’être accompagnés sont suivis dans une vision d’autonomie et d’adaptabilité de leurs nouvelles compétences dans leur propre domaine d’expertise.

C’est ainsi que les hubs offrent généralement toute une flopée d’events plus stimulants les uns que les autres, que ce soit des moments de formation, d’échanges de bonne pratique, de découverte de nouveaux outils et de création à proprement parler. Et on sait que ça fonctionne quand dans le public, ce n’est pas toujours les mêmes têtes qu’on voit.

Et donc, en dehors de cette opportunité de réseautage et de développement des compétences par le suivi de personnes qualifiées, les hubs créatifs valorisent l’autonomisation par une valorisation de l’expression personnelle. La création, de n’importe quel type, permet aux individus d’avoir confiance, d’être encouragés et de développer leur identité créative.

Peut-on donc dire que le TRAKK est un hub créatif ?

La réponse est oui. Au même titre que les 8 autres hubs créatifs reconnus en Wallonie (financés par le Feder). La carte ci-dessous les énumère.

D’ailleurs, on vous met les liens pour vous puissiez aller les découvrir : le Green Hub du Luxembourg – Le Plug R de Liège – Le Hub créatif de SeraingLe Hub créatif de Verviers – Le Trakk de Namur (c’est nous!) – l’Open Hub de Louvain la Neuve – Le Hub créatif Charleroi Métropole – Le Click de Mons et le Wap’s Hub en Wallonie Picarde.

Ces hubs offrent des services communs : travailler, s’inspirer, créer et partager. Au-delà des verbes, on y sent aussi des missions et des valeurs portées par le fond et la forme présentés précédemment – On sait… La Grand Poste par exemple à Liège, ça ressemble EXACTEMENT à tout ce qu’on vient de dire et pourtant, c’est pas dans la liste…

Vous suivez bien ! C’est vrai que ce sont aussi des espaces créatifs, qui souvent d’ailleurs, travaillent dans les mêmes domaines. La Grand Poste à Liège se définit comme étant un district créatif, l’A6K à Charleroi comme un pôle industriel et numérique et BeCentral à Bruxelles, comme un digital campus (à lire in English my love).

Ces lieux se ressemblent certes, à une distinction importante près : l’accompagnement des start-ups à se développer et augmenter leur plein potentiel. On vous renvoie d’ailleurs vers le dossier “What’s Hub” qui retrace les plus belles succes stories des hubs créatifs de Wallonie.

Mais… on a quand même une question existentielle…

Est-ce que ça fonctionne ce truc ?

Franchement, on ne va pas vous mentir. Pas facile de trouver des chiffres. D’ailleurs, on n’en a pas trouvés. Mais à l’écriture de cet article, on a bien conscientisé que la communication autour de ces lieux créatifs n’est pas optimale. D’abord, parce que tout le monde n’y a pas forcément accès, en termes de coûts (parce que oui, il y a un petit budget à prévoir), de temps (si vous avez envie de développer votre projet créatif, faut-il encore que vous ayez l’espace pour le faire) et de sensibilité (tout le monde n’a pas forcément la personnalité à intégrer ce genre d’espaces créatifs, sans frontière, en communauté).

©Alexine Somville

Ensuite, parce que notre culture wallonne n’est pas très développée en ce qui concerne la culture du partage, du sharing. Des fois, on préfère réinventer la roue 50 fois (question d’ego peut-être), plutôt que de collaborer avec d’autres et de s’inspirer (sans reproduire) ce qui existe déjà. Ça vient sûrement d’une image collective stéréotypée qui a du mal à considérer les industries culturelles et créatives comme étant un domaine professionnel innovant et performant pour l’avenir. Comme si l’art et la société étaient antinomiques, comme si la culture n’avait aucune valeur si ce n’est celle de divertir. Et dans ce contexte, c’est donc difficile d’encourager l’entreprenariat créatif.

Au final, c’est là l’intérêt de ces hubs créatifs. C’est justement le pouvoir de l’émergence d’écosystèmes créatifs dynamiques où les talents peuvent être découverts, reconnus, récompensés et émancipés. C’est la combinaison de la forme (qui ressemble aux autres) et du fond (qui rassemble toutes les missions) qui permettent à ces lieux de se démarquer des autres et qui méritent qu’on pousse la porte.

Suffit juste d’oser… et d’avoir la bonne clé quand même.

Source: https://artsetmetiers.fr/fr/quest-ce-quun-fablab

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