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Sam Altman, l’épouvantail indétrônable d’OpenAI

Auteurice de l’article :

François Genette

Accro à l’actu, fan de la culture geek, aficionado de tech digitale et gamer acharné, François Genette est passionné par tout ce qui touche au numérique. Journaliste pendant près de 15 ans dans les grands médias nationaux et locaux, il utilise aujourd’hui sa plume pour partager ses découvertes venant des univers qu’il affectionne.

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C’est une séquence digne des meilleures séries à suspense qui vient de se dérouler chez OpenAI. La puissante firme américaine fondatrice de ChatGPT vient en à peine cinq jours de virer et de réengager son fondateur et PDG, Sam Altman, suite à un incroyable retournement de situation.

“Nous sommes parvenus à un accord de principe pour le retour de Sam Altman en tant que CEO d’OpenAI.” 

La phrase date du 22 novembre. Soit cinq jours après un autre communiqué de la firme spécialisée dans l’intelligence artificielle qui avait un tout autre ton : “Sam Altman quitte la société. (…) Le conseil d’administration estime ne plus avoir suffisamment confiance dans sa capacité à mener OpenAI”.

Entre les deux, le chaos total et une séquence qui a presque entraîné la chute complète de l’entreprise technologique et digitale la plus en vogue en ce moment.

Sam Altman, génie hors de contrôle

L’acteur central de ce feuilleton, c’est bien évidemment le fantasque fondateur d’OpenAI. Âgé de 38 ans, considéré comme un génie de la tech digitale, Sam Altman fait partie de ces personnes capables de changer le monde à elleux toustes seul·es. Après avoir fait fortune en revendant une application mobile axée sur la géolocalisation qu’il a lancée à 19 ans à peine, c’est entre autres avec Elon Musk qu’il fonde OpenAI, une organisation de recherche sur l’intelligence artificielle.

L’entreprise est construite comme une entité sans but lucratif et le natif de Chicago voit en celle-ci l’opportunité de son rêve ultime : concevoir une intelligence artificielle générale suffisamment puissante et développée pour aider l’humanité à réaliser des avancées importantes dans divers domaines tels que la santé, l’éducation, la productivité et à faire face à des problématiques aussi capitales que le changement climatique.

Peu à peu, Sam Altman impose sa griffe et prend le réel leadership de la société. Sa folie des grandeurs impressionne autant qu’elle inquiète. Car pour parvenir à atteindre ses objectifs, il n’hésite pas à changer les statuts de la société, transformant le caractère sans but lucratif en un but lucratif plafonné. Un changement qui provoque les premiers remous et qui entraîne notamment la démission d’Elon Musk, le fantasque dirigeant de SpaceX et de Tesla, du conseil d’administration.

Mais ce n’est pas tout, Sam Altman entraîne OpenAI vers un rapprochement de plus en plus important avec le géant américain Microsoft et se rend aussi dans les pays de la péninsule arabe afin de chercher des financements supplémentaires pour atteindre ses objectifs. Des prises de position discutables qui provoquent des frictions au sein des instances dirigeantes de la société.

La peur d’une IA destructrice de l’humanité

Mais le point de discorde le plus important, il vient après l’arrivée de ChatGPT en 2022. Pour rappel, cette intelligence artificielle d’un genre nouveau et développée sous la forme d’un programme conversationnel est capable de proposer des réponses à des questions, de compléter des phrases, de traduire des textes, d’écrire des articles et de tenir des conversations avec des humains. 

La puissance et l’évolution incroyablement rapide de ce modèle a pris le monde entier par surprise, ouvrant à la fois des perspectives inimaginables jusqu’alors mais posant également de nombreuses questions et craintes quant aux retombées potentiellement catastrophiques qu’un tel programme pourrait générer.

Et c’est justement à ce niveau qu’un schisme très important s’est rapidement créé chez les pionnier·ères de cette technologie. D’une part, on retrouve celleux qui, comme Altman, pensent que les intelligences artificielles telles que ChatGPT doivent être déployées au contact du grand public afin de pouvoir être constamment testées et perfectionnées grâce à une utilisation massive et régulière.

De l’autre, on retrouve de nombreux·ses spécialistes dans le domaine, dont plusieurs membres du conseil d’administration d’Open AI qui craignent pour leur part qu’un tel outil devienne assez rapidement incontrôlable et mène à une catastrophe mondiale, voire à l’éradication pure et simple de l’humanité. (Non, vous n’êtes pas le nouveau Terminator, on parle bien de craintes réelles et étayées d’expert·es du secteur.)

Le coup de tonnerre du 17 novembre

Bien que cet écart de vision concernant la direction à prendre se développe de plus en plus entre Altman et plusieurs de ses co-actionnaires, personne ne voit venir la décision du conseil d’administration prise le vendredi 17 novembre. Pas même le principal intéressé. 

C’est par visioconférence qu’il lui est annoncé qu’il est évincé de son poste de CEO de l’entreprise. Les mots utilisés sont durs et sans détours : “Le départ de M. Altman fait suite à un processus d’examen délibératif mené par le conseil, qui a conclu qu’il n’avait pas toujours été franc dans ses communications avec le conseil, ce qui a entravé sa capacité à exercer ses responsabilités. Le conseil d’administration n’a plus confiance en sa capacité à continuer à diriger OpenAI”.

La tentative de putsch est brutale et claire. Elle vise à mettre Sam Altman hors du processus décisionnel et à changer en profondeur le modèle d’évolution des différentes IA développées par la firme. 

Mais ce que le conseil d’administration n’a pas vu venir, c’est l’incroyable et ultra rapide succession d’événements qui vont suivre cette éviction.

Quelques heures à peine après avoir été limogé, Sam Altman est contacté par Microsoft, qui lui propose de prendre la tête de son département dédié à l’intelligence artificielle. À la clé, les pleins pouvoirs et des émoluments revus à la hausse. Les tractations sont menées tambours battants et le 20 novembre, soit à peine 3 jours après son départ forcé, Altman retweete l’annonce de Satya Nadella, CEO de Microsoft : “Nous sommes extrêmement heureux·ses d’annoncer que Sam Altman et Greg Brockman, ainsi que leurs collègues, rejoindront Microsoft pour diriger une nouvelle équipe de recherche avancée sur l’IA. Nous sommes impatient·es d’agir rapidement pour leur fournir les ressources nécessaires à leur réussite”.

OpenAI au bord du gouffre

Mais ce n’est pas encore la fin de la déconvenue pour les gestionnaires d’OpenAI. Suite à l’annonce du départ d’Altman, une énorme vague de mécontentement se crée au sein du personnel de la société. Quelques heures plus tard, c’est via un communiqué que 730 des 770 employé·es de la firme font une annonce commune dans laquelle iels menacent de toustes quitter le navire OpenAI pour rejoindre leur désormais ancien CEO chez Microsoft. La seule manière de les faire changer d’avis, c’est de réintégrer Altman dans son ancienne fonction.

Le “board” de l’entreprise n’a plus trop le choix. En perdant la quasi-totalité de ses spécialistes, OpenAI court à sa perte. Peu à peu, les différents décideur·euses prennent position et se résignent à revenir sur leur décision. 

Iels font une proposition à Sam Altman de reprendre sa place de PDG. Mais ce n’est pas tout, trois des quatre membres du conseil d’administration qui ont voté la destitution de l’homme fort d’OpenAI sont également prié·es de quitter l’organe de gestion. Le désaveu est total. La puissance d’Altman en tant que dirigeant de la société est, pour sa part, renforcée.

Et maintenant ?

Qu’attendre à présent de ce retour tonitruant ? Le premier élément, c’est Sam Altman lui-même qui le donne dans son tweet du 22 novembre : “J’adore OpenAI, et tout ce que j’ai fait ces derniers jours a servi à maintenir cette équipe et sa mission ensemble. Lorsque j’ai décidé de rejoindre Microsoft, il était clair que c’était la meilleure voie pour moi et l’équipe. Avec ce nouveau conseil d’administration, j’ai hâte de revenir à OpenAI et de bâtir un solide partenariat avec Microsoft.”

La donne est donc claire. C’est toutes voiles dehors qu’Altman va à présent poursuivre son ambition démesurée. Avec quelles conséquences ? Seul l’avenir nous le dira.

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