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KIKK 2023 : entre corps et eau, un festival polymorphe

Auteurice de l’article :

Marie-Flore Pirmez

Véritable vorace de podcasts et de documentaires, Marie-Flore croit fermement en un renouveau du journalisme écrit grâce aux multiples opportunités du web et des magazines longs formats. Lorsqu'elle enlève sa casquette de journaliste, vous risquez de la croiser en train de randonner ou dans un studio de yoga.

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Du 26 au 29 octobre prochains, la douzième édition du KIKK Festival envahira une dizaine de lieux atypiques ou patrimoniaux du centre de Namur. La programmation poursuit l’objectif inscrit dans l’ADN même du festival international des cultures numériques et créatives : décloisonner sciences, technologies et arts.

En chimie ou en minéralogie, le polymorphisme est la faculté que possède une substance de se cristalliser dans des structures différentes selon les conditions de son environnement, comme la température ou la pression. Pour le KIKK, cette propriété est la source d’une créativité infinie en termes de programmation. Mais que faire, que voir, qu’apprendre et que découvrir lors de cette édition ? Lisez plutôt.

Côté conférences, 52 intervenant·es venu·es du monde entier prendront la parole pour aborder des thématiques variées mais toutes interconnectées : web, graphisme, design, intelligences artificielles (IA), art numérique, réalité virtuelle (VR) et réalité augmentée (AR), narration immersive, creative coding, technologies… L’ouverture du festival sera matinale et en grande pompe au Théâtre de Namur avec Nelly Ben Hayoun-Stépanian. L’artiste et réalisateurice français·e nous fera voyager à travers sa pratique décoloniale pour susciter une imagination radicale. Véritable force de la nature au CV débordant, iel a toujours rêvé de devenir astronaute et collabore aujourd’hui avec le SETI Institute et la NASA. Entre autres.

Nelly Ben Hayoun and their electric Porsche Tuycan and virtual world © Naomi Ngoo Richmond

D’autres grands noms se relaieront le micro, comme Kirsty Jennings. La productrice exécutive chez Anagram – un studio créatif anglais spécialisé en narration interactive et immersive – se concentrera sur “Goliath: Playing with Reality“. Cette expérience VR primée à la Mostra de Venise 2021 retrace avec virtuosité le parcours d’un anonyme schizophrène malmené par les institutions psychiatriques, tout en brouillant les frontières entre réel et virtuel.

Ne manquez pas non plus les Japonais du studio d’art Maywa Denki pour un concert-performance popkitsch. Un première scène en Belgique pour ces artistes et leurs bien curieux instruments de musique électromécaniques. Ou encore Valentina Peri, artiste, autrice et commissaire d’exposition indépendante, pour son talk intitulé “Love, Lies and Romance Scam“. Une exploration de l’amour, de l’intimité et de la tromperie à l’ère du numérique. Un petit dernier pour la route ? Jack Isles, architecte, chercheur et cartographe, proposera un exposé tant politique que militant pour documenter et dénoncer la violence en mer soutenue par les États aux abords de l’Europe. Membre de l’agence d’investigation suisse Border Forensics, il mettra en lumière diverses stratégies de résistance contre la criminalisation de la migration et la surveillance généralisée des frontières maritimes.

Une thématique pour s’approprier la révolution numérique en cours

Bodies of water“. Comprenez “étendue d’eau”. Avec cette thématique transversale, le KIKK Festival 2023 souhaite explorer les relations entre l’eau et le phénomène de la vie sur Terre. Comme l’énonce Marie du Chastel, directrice artistique de KIKK et curatrice du KIKK festival : “Nous transpirons, nous urinons, nous ingérons, nous éjaculons, nous avons nos menstruations, nous allaitons, nous respirons, nous pleurons. Le processus de la vie est ainsi étroitement lié à des questions de fluides”. Qu’ils soient culturels, politiques, économiques ou maritimes, les flux de tout type se feront fil rouge de cette édition. Inévitablement, la programmation fera également la part belle à des considérations écologiques et sondera l’impact humain sur le cycle de l’eau.

Dans son ambition de toucher des publics toujours plus diversifiés, le KIKK Festival s’adresse d’une part aux professionnel·les du secteur numérique, avec des espaces comme le KIKK Pro, la présence de la crème des écosystèmes créatifs mais aussi de pavillons internationaux représentant des dizaines de nationalités, ou bien “KIKK ta carrière”, véritable plateforme de rencontre et d’échange entre talents et grands noms du paysage industriel belge. Une application mobile munie d’une IA fait d’ailleurs son apparition durant le festival afin d’assister les pros dans leur quête de nouveaux profils. Ça matche ? Les professionnel·les peuvent alors directement prendre rendez-vous avec leurs potentielles nouvelles recrues.

Mais le KIKK s’attache aussi à rencontrer les besoins et les envies du tout public et des familles. Les objectifs du festival concernant le grand public sont d’ailleurs multiples : inspirer le territoire, permettre à chacun·e de comprendre la révolution numérique, de la questionner, la tester, la manipuler, voire devenir acteurice de cette révolution, mais aussi transformer le regard posé sur la Ville de Namur. L’exposition KIKK in Town emmènera les visiteur·euses dans un parcours à travers la capitale wallonne et présentera une cinquantaine d’installations artistiques monumentales ou microscopiques. L’occasion de (re)découvrir des lieux mythiques comme la Halle Al’ Chair, spectaculaire bâtiment du 16ème siècle récemment rénové, la chapelle Sainte-Marie, trésor caché dans la cour d’une école, Le Pavillon, immanquable ancien pavillon belge de l’Exposition Universelle de Milan 2015 aujourd’hui transformé en lieu d’expo par l’asbl KIKK et niché en haut de la Citadelle, ou l’immense salle de basket de l’Institut Saint-Louis plongée dans le noir pour vous immerger dans l’œuvre paysage d’Hicham Berrada. Intitulée « Présage », cette projection a fait sensation lors de la dernière exposition “Avant L’Orage” à la Bourse de Commerce Pinault Collection de Paris.

Hicham Berrada – Climats artificiel © Laurent Lecat

Le cru KIKK in Town 2023 vous réserve bien d’autres rencontres artistiques surprenantes. Assistez aux performances “Phantom Limb” (Le Membre fantôme). Un projet de l’artiste multidisciplinaire Amos Peled qui explore la relation énigmatique et poétique entre un être humain et la boîte de Pandore qui compose son intérieur à travers l’utilisation d’un appareil à ultrasons médical. Explorez les questions liées à la réparation du climat et au technosolutionnisme avec “Ce qui disparaît se transforme immédiatement en éternité“. Une installation de Barthélemy Antoine-Lœff et Antoine Meissonnier mettant en action un laboratoire fictif de mesure de la fonte de mini icebergs symboliquement générés dans de la glace par une IA. Tendez l’oreille sur une autre note environnementale de l’artiste médiatique Marco Barotti avec “Clams“. Une expérience métaphorique de sonification des données matérialisée par une série de petites palourdes qui convertissent les datas envoyées par des capteurs de qualité de l’eau de la Sambre en sons et en mouvements. Et terminez la journée en vous laissant bercer par les larmes de Maurice Mikkers. Dans son projet photographique en cours « Imaginarium of Tears », l’artiste néerlandais capture des micrographies de larmes afin de sensibiliser aux histoires ou aux défis qui ont provoqué ces fluides de chagrin ou de joie, c’est selon.

Workshops, masterclasses, concerts et DJ sets… Il est impensable d’intégrer en si peu de lignes le caractère foisonnant de cette programmation 2023, mais nombre d’autres activités raviront à la fois petit·es et grand·es, simples curieux·ses ou aficionados des sciences, des tech et des arts.

Programmation complète sur kikk.be

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