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AuthenTikTok, la beauté sans filtre

Auteurice de l’article :

Jil Theunissen

Évoluant entre droit, médias, culture et nouvelles technologies, Jil s’est récemment lancée dans la collection officielle de casquettes. À ses heures perdues et souvent pendant la nuit, elle rédige différents contenus allant de la chronique au texte de loi, et développe des projets un peu hybrides mixant les diverses disciplines mentionnées ci-dessus.

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#BoldGlamour, #Teenager, les récents filtres TikTok ont fait couler beaucoup d’encre (et de larmes) ces dernières semaines. Des innovations qui prouvent que le réseau chinois avance toujours plus dans sa quête d’authenticité, d’amour de soi et, surtout, de cohérence.

Si comme nous, quand on vous dit “filtre beauté”, vous pensez avec une pointe de condescendance aux oreilles de chien autour des têtes des influenceuses, sachez que vous êtes complètement démodé·e. Voici donc un rapide rattrapage pour revenir dans le coup : trois nouveautés quasi simultanées ayant fait TikTok fin février et qui, grâce à leur logique implacable, apportent enfin clarté et cohérence dans le monde obscur de la beauté en ligne.

Buzz n°1

BoldGlamour. La Rolls du filtre beauté, LA formule qui révélera instantanément la Kim Kardashian qui est en vous. Utilisé plus de 9 millions de fois la semaine qui a suivi sa sortie, ce filtre a défrayé la chronique. Techniquement, il révolutionne les pratiques : adieu les tremblements et autres glitch révélant habituellement la virtualité des transformations, BoldGlamour vous colle littéralement à la peau, produisant un résultat inexplicablement réaliste (pour qui trouve la tête de Kim réaliste, mais c’est un autre sujet).

Le souci, c’est qu’il est tellement bien fait qu’il en vient à complexer tout le monde, particulièrement les ados, fervents utilisateurs et (surtout) utilisatrices du réseau. Diffusant des standards de beauté aussi illusoires qu’inaccessibles, l’utilisation généralisée des filtres a fait exploser les cas de dysmorphophobie, troubles de l’estime de soi, anorexie, dépression, voire de suicide chez les jeunes ces dernières années. Il ne s’agit plus de se comparer à une star, magnifiée mais bien réelle, mais à une version virtuelle de soi-même, créée de toutes pièces. Un message : “Voilà à qui tu pourrais presque ressembler, mais à qui, en réalité, tu ne ressembleras jamais”. Et en filigranes : “Tu pourrais être tellement mieux que ce que tu es”.

Buzz n°2

S’il a moins fait parler de lui, le filtre #Teenager, sorti quelques jours plus tôt, a pas mal secoué la génération X. Même technologie, qui vous dévoile ici tel·le que vous étiez à 14 ans. Découvrant en direct leur version joufflue et chevelue d’adolecent·e, les internautes ne se tiennent plus. D’introspection en effusion de larmes, si on résume les réactions, on arrive plus ou moins à ceci : “Oh long silence Waouw larmes Oh si j’avais pu prendre conscience, à l’époque, de ma beauté re-larmes oh my God reniflement Et dire que je me trouvais moche… Si je pouvais lui dire maintenant, tu es parfait·e, ne change rien! re-reniflement“.

Vous sentez poindre un léger paradoxe face à la lecture couplée de ces deux infos ? Vous vous dites que peut-être il eût été utile de faire… dialoguer les deux communautés ? Que vous êtes mignon·ne !

Buzz n°3

Trêve de naïveté, achevons notre tour du monde de la cohérence avec LE sujet au cœur des valeurs de TikTok, son combat au quotidien : la protection de la jeunesse. Histoire d’éviter que les ados ne s’affament trop pour obtenir les joues creusées de Kimmy, le réseau social a lancé le 27 février une campagne à l’occasion de la semaine de la lutte contre les troubles du comportement alimentaire. Comment ça, vous ne l’avez pas vue passer ?! Elle était pourtant bien visible, planquée sur la page 3463 du site, dans sa version US uniquement ! Encourageant les internautes à s’exprimer avec authenticité, en parfaite cohérence donc avec BoldGlamour lancé deux jours plus tôt, la campagne s’organisait autour d’un message : tu es très bien comme tu es. C’est donc naturellement que TikTok a choisi de l’intituler #ItsTimeForChange.

©site TikTok / Jil Theunissen

Voilà.

À quelques jours d’intervalle, nous avons donc :

1. Un filtre qui encourage les ados à changer;

2. Un filtre qui encourage les adultes à regretter d’avoir voulu changer quand iels étaient ados;

3. Une campagne qui encourage les ados et les adultes à arrêter de vouloir changer et qui s’appelle #IlEstTempsDeChanger.

On ne sait pas si vous avez tout compris, mais personnellement ça nous coupe un peu l’appétit (ce qui a priori n’est pas le but recherché, surtout par le point 3, mais passons). Ce qui est sûr, c’est que sur TikTok, le changement, c’est maintenant, enfin sauf pour Kim Kardashian, qui est très bien comme elle est.

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