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Article 6 minutes de lecture

Le numérique et l’art, combo créatif puissance 100.000 (euros)

Auteurice de l’article :

Cassi Henaff

Cassi ou Cassiopée (pour les très intimes) \ nom propre : prénom féminin \ Synonyme : couteau suisse - Objet présentant des outils ingénieusement assemblés à un couteau pour tenir dans une poche et répondant à de multiples fonctions ; Femme un peu folle, passionnée par la combinaison de l’art et du numérique, pédagogue et féministe, engagée dans des projets porteurs de sens ; Animal qui n’a pas sa langue en poche ; Pile électrique qui ne sait pas choisir entre les burgers et les pizzas, qui marche beaucoup, mange beaucoup, rit beaucoup, et travaille beaucoup.

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“Est-ce que c’est de l’art”? La question à 100.000€. Les réponses sont forcément subjectives par le fait que chacun•e a sa perception de ce qu’est une œuvre. Et si on y ajoute la dimension du numérique, alors là, les esprits s’affolent. Si pour certain•es, le numérique n’est qu’une évolution logique des pratiques artistiques, pour d’autres, c’est la mort de la créativité et de la technique.

Avant même d’infirmer cette deuxième hypothèse qui suppose que le numérique est un nivellement par le bas, on va d’abord expliquer ce que sont les arts numériques. Pour bien comprendre, il faut le voir comme une cascade : d’abord, les arts numériques définissent des pratiques artistiques qui utilisent le numérique soit dans la création, la production, l’expérience ou la diffusion. Ensuite, les pratiques artistiques sont des formes d’expression qui prennent appui sur un art. Et les arts sont classés en 10 catégories différentes (bien qu’avant d’écrire cet article, on pensait qu’il n’y en avait que sept. Voilà.)

Pas dans l’ordre, on a :

  1. L’architecture
  2. La sculpture et la céramique
  3. Les arts visuels comme la peinture, le dessin, la gravure, la calligraphie, le tatouage
  4. Les arts littéraires, en ce compris la poésie
  5. Les arts de la scène, comme la danse, le théâtre, le cirque, le mime, la magie, l’humour, etc.
  6. La musique
  7. Le cinéma (héhé, le mettre en septième position n’était même pas fait exprès)
  8. Les arts médiatiques comme la photo, la télé ou la radio
  9. La bande dessinée
  10. Les arts multimédias avec, comme exemple le plus connu, le jeu vidéo.

Les arts numériques, ce sont donc toutes ces formes artistiques qui utilisent d’une manière ou d’une autre les évolutions informatiques et donc technologiques pour produire, innover ou encore mémoriser et transmettre les œuvres. 

Bien que le numérique, en opposition à l’analogique, soit un langage binaire, il faut surtout ici le comprendre dans son aspect format :  photo, son, vidéo, hologramme, projection, réalité augmentée, réalité virtuelle, impressions 3D, etc. 

Du coup, quand on combine tout ça, on se rend compte (ou pas) du nombre d’arts numériques possibles. 

Pour dépasser la simple utilisation de la tablette en dessin par exemple, on a décidé de mettre le focus sur 5 formes d’arts numériques par des exemples assez fabuleux qui démontreront que l’utilisation du numérique n’affaiblit en rien ni la créativité, ni la technique. Que du contraire. 

1. L’art sonore

Souvent, cette forme d’art est interdisciplinaire, c’est-à dire qu’elle se conjugue parfaitement avec d’autres arts et très souvent, c’est le binôme image-son qu’on connaît le mieux. Mais ici, on va tenter de s’y intéresser dans son aspect individuel, considérant le son plutôt comme un matériau de création plutôt que comme un support, ou même, un vecteur.  

En d’autres termes, les instruments, les concerts, les performances font partie des arts sonores. Mais certaines œuvres sont encore plus uniques: elles sont appelées acousmatiques car elles ne donnent rien à voir. 

On retiendra typiquement le génie de Max Neuhaus en 1966 qui lance un projet d’écoute active engagée, décliné sur plusieurs formats. Entre autres (1979), il se baladera dans les rues de Brooklyn à distribuer des cartes postales sur lesquelles n’était écrit qu’un seul mot : Listen! Une véritable ode à l’écoute des bruits environnants (et en même temps, une critique d’une société moderne envahie par des flux sonores de voitures, d’industries et du vacarme d’une ville capitaliste).

Plus récemment, on pourrait parler de deux œuvres : d’abord Sonic Loft d’Alexandra Dementieva. Dans ce cas, il s’agit d’un espace de jeu où le sol est recouvert d’une part d’un tapis insonorisant et d’autre part, d’objets interactifs qui s’activent au toucher du public. Ensuite, d’Untitled (sons infinis) d’Ann Veronica Janssens qui est composée de deux hauts parleurs qui se regardent et qui diffusent des sons superposés. L’arrangement spatial donne au spectateurice une impression de chute libre s’iel se place au centre de l’installation les yeux fermés. Vertigineux. 

2. L’art DIY

A ne pas prononcer “dihi” mais bien D.I.Y en anglais, comme Do It Yourself. Cet art, très souvent assimilé à l’art détourné, est aussi souvent associé à l’art électronique. Et comme tout le monde le sait (ou pas), l’électronique traite 3 types de signaux : l’analogique, le numérique et la puissance. Et bim, ça donne des œuvres comme celle de Scenocosme qui réunit Grégory Lasserre & Anaïs met den Ancxt. Parmi toutes leurs installations, Souffles est un bon exemple. Il s’agit d’une œuvre collective et interactive où les respirations des spectateurs et spectatrices permettent de révéler des couches vidéo. Au même titre qu’“Urban Lights Contacts” est une installation interactive, tactile et collective qui détourne un espace public et illumine la façade d’un grand immeuble. Cet exemple est très représentatif du DIY associé à l’électronique: une personne est invitée à poser sa main sur une boule mais rien ne se passe. En revanche, lorsqu’elle rentre en contact avec d’autres peaux, les signaux s’activent et produisent des variations lumineuses et sonores. 

3. Le bio art

On a découvert cette pratique artistique au Pavillon à Namur, lors de l’exposition Biotopia. Le bio art, c’est l’art du tissu vivant. Les artistes travaillent la matière vivante pour en créer une œuvre artistique et très souvent, comme dans beaucoup de formes artistiques, les intentions et réflexions sociales derrière sont puissantes. 
L’expo proposait un tas d’œuvres en bio art mais celle qui a retenu toute notre attention, sans grande surprise est une installation bio et… sonore! Zimoun, artiste suisse nous a directement happé·e avec son œuvre 25 woodworms, qui se compose d’une écorce de bois, d’un micro et d’un casque. A priori, on reste dubitatif devant cette boîte de verre. Ce n’est qu’une fois le dispositif placé sur les oreilles qu’on entend le bruit de 25 vers à bois. En plus de rendre l’invisible audible, ce qui est fascinant est la manière dont le vivant mange et transforme le bois.

4. L’art génératif

On avance avec de l’art génératif, ou algorithmique (ce mot galvaudé qu’on entend partout). On a voulu faire un résumé de ce qu’on a lu à propos de cette pratique et puis on est tombé·e sur la définition parfaite. 

“L’art génératif (“generative software art”), comme on le comprend habituellement aujourd’hui, est une pratique artistique qui utilise des algorithmes mathématiques pour produire automatiquement ou semi-automatiquement des expressions dans des formes artistiques plus conventionnelles. Par exemple, un programme génératif pourrait produire des poèmes, des images, des mélodies, ou des animations. Habituellement, l’objectif d’un tel programme est de créer des résultats différents à chaque fois qu’il est exécuté. Et généralement, on espère que ces résultats auront une valeur esthétique et qu’ils seront distincts les uns des autres, dans des variantes intéressantes.

Ah, on te l’avait dit que c’était top. 

Mario Klingemann a développé et nourri une intelligence artificielle pour créer des portraits à l’infini. Memories of Passersby, est composé d’un meuble en bois dans lequel on retrouve le “cerveau de l’IA” connecté à deux grands écrans qui diffusent des peintures influencées par le courant du 17eme et 19eme siècle. 

La fluidité du mouvement rend l’œuvre quelque peu effrayante mais totalement hypnotique.

Dans un registre beaucoup plus drôle, parlons de Shimon, le robot musicien. En puisant dans une base de données de 5000 chansons et de plusieurs milliers de morceaux de musique, il est capable d’improviser un boeuf avec des musiciens humains. Et cerise sur le gâteau, ces 4 bras lui permettent d’exercer des sons impossibles à réaliser par nos deux membres supérieurs. Un exemple à Utrecht, ça envoie du lourd.

5. L’art du jeu vidéo

La question n’est pas de savoir si un jeu vidéo est une œuvre artistique (oui). C’est un autre débat. Mais on vous lance quand même la réflexion de Vincent Mauger, chargé de cours à l’Université de Laval, au Canada : ​​”Le jeu vidéo peut produire des œuvres d’art, mais l’industrie du jeu vidéo n’est pas nécessairement une industrie artistique”. Voilà. Vous avez deux heures. 

Dans l’art jeu vidéo, l’idée est de détecter les critères médiatiques (visuels, sonores, cinématique, etc.) d’un jeu vidéo et de les transposer à d’autres formes artistiques. On a en tête l’excellent clip vidéo de Bjork, Notget VR mais aussi le plus connu pixel art. Et pour sortir des sentiers battus, on vous invite à découvrir le Conway’s Game of Life. 

Il s’agit d’un jeu à la base, détourné pour créer de l’art jeu vidéo. A partir d’une plateforme en ligne https://playgameoflife.com, il est possible de s’essayer à l’art JV, en sachant que 

Quatre principes sont à prendre en compte : 

  1. Une cellule vivante meurt si elle a moins de deux voisines vivantes.
  2. Une cellule vivante survit si elle a deux ou trois voisines vivantes.
  3. Une cellule meurt si elle a plus de trois voisines vivantes.
  4. Une cellule morte avec exactement trois voisines vivantes devient une cellule vivante.

Et puis quand tu gères vraiment, ça donne ça :

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