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L’IA, une révolution majeure dans le monde du sport

Auteurice de l’article :

François Genette

Accro à l’actu, fan de la culture geek, aficionado de tech digitale et gamer acharné, François Genette est passionné par tout ce qui touche au numérique. Journaliste pendant près de 15 ans dans les grands médias nationaux et locaux, il utilise aujourd’hui sa plume pour partager ses découvertes venant des univers qu’il affectionne.

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L’incroyable évolution de l’intelligence artificielle depuis deux ans impacte très fortement de nombreux secteurs en leur offrant des perspectives jusqu’alors inatteignables. Parmi ceux-ci, le sport profite lui aussi de ces nouvelles technologies pour faire sa propre révolution. Et celle-ci s’annonce vertigineuse.

Rendez-vous était pris ce lundi 17 juin au Martin’s Hotel de Tubize. Un lieu très à propos en cette période, puisqu’il se trouve être le camp de base des Diables rouges. C’est en effet là que les joueur·euses belges s’entraînent avant un match et donnent leurs interviews à la presse.

Mais en ce lundi, pas d’entraînement ouvert au public ni même d’événement lié à notre sélection nationale (cette dernière étant à Cologne pour un match de l’Euro contre la Slovaquie qu’on oubliera au plus vite), mais une conférence très attendue sur le thème de la sports tech. Derrière ce terme “valise” se cache un gigantesque écosystème en rapide expansion. Et pour l’expliquer, rien de tel que de démarrer par une petite définition du concept.

La sports tech, c’est la contraction de deux mots : sport et technologies. L’idée ici, c’est d’utiliser l’ensemble des nouvelles technologies, qu’elles soient matérielles mais aussi et surtout digitales, au service du sport. Et quand on parle de sport, on parle non seulement de celles et ceux qui le pratiquent (de manière professionnelle ou en tant qu’amateurices), mais aussi des règles qui le régissent, et de l’organisation qui existe pour que ce dernier soit pratiqué dans de bonnes conditions et puisse être, le cas échéant, vécu de manière optimale par les spectateurices.

Un événement pour placer la Belgique parmi les pionnier·ères

Mais revenons à l’événement en question, qui s’inscrit plus largement au sein de la plateforme belge Sports Tech. Lancée à l’initiative d’Agoria, qui regroupe les acteurices de l’industrie technologique belge, elle compte en ses rangs des partenariats particulièrement intéressants, comme l’Union belge de football et EVS, leader incontesté des productions vidéo dans le monde du sport (les ralentis que vous voyez lors de tous les matches de football, c’est eux).

Au niveau de sa mission, Sports Tech a pour but de présenter les avancées de la Belgique en termes d’innovation et surtout d’attirer et de fédérer les startups belges autour des très nombreux challenges qui ne cessent d’apparaître dans le secteur.

Car si la structure existe depuis 2021, celle-ci connaît depuis deux ans un incroyable coup de boost avec l’émergence de l’intelligence artificielle. Cette accélération nécessite donc de faire appel à des entreprises spécialisées dans ces technologies pour pouvoir proposer des concepts innovants. Et pour aider ces dernières, le collectif à la tête ne fait pas uniquement de la communication, il propose un coup de main non seulement en termes de coaching mais aussi de financement, comme l’explique Nicolas Bourdon, qui fait partie de la plateforme. “De trop nombreuses start-ups belges actives dans le monde du sport doivent s’exporter pour trouver des supports financiers et structurels à l’international en vue de développer leurs activités. Sports Tech Belgium ambitionne de devenir le point de connexion entre le monde des entreprises et des organisations sportives, favorisant les initiatives entrepreneuriales et positionnant à l’avant-plan des technologies du sport au niveau mondial.”

L’Intelligence artificielle au secours des arbitres…

S’il y a une composante du sport pour laquelle la technologie était attendue depuis longtemps, c’est l’arbitrage. Car qui dit des décisions prises par une personne, dit également d’innombrables discussions relatives à ces dernières, avec souvent des accusations d’influence voire de corruption provenant de l’un ou l’autre camp.

En football notamment, on peut voir ces technologies digitales s’intégrer dans le fonctionnement du jeu depuis un certain temps, et ce, de manière de plus en plus poussée et ingénieuse. Parmi les exemples plus anciens, il y a la goal-line technology, qui permet de définir si oui ou non, le ballon a franchi la ligne de but. Si tel est le cas, alors l’arbitre reçoit sur sa montre un avertissement qui lui permet de prendre la bonne décision.

Dans la même veine, des systèmes toujours plus pointus ont été définis pour décider si oui ou non un·e joueur·euse de champ se trouvait “hors-jeu”. Pour celleux qui ne maîtrisent pas les règles, le hors-jeu est sifflé lorsqu’un·e joueur·euse de champ se trouve derrière les 10 joueur·euses de champ adverses au moment de la passe d’un·e de ses coéquipier·ères. Dans un tel cas, le jeu est arrêté et un coup franc est donné à l’équipe adverse.

Ce genre de phase se joue parfois à quelques centimètres, voire à quelques millimètres. Là encore, des technologies toujours plus sophistiquées ont été mises en place. Avec aujourd’hui l’utilisation de très nombreux capteurs placés dans le ballon et dans le stade. Ils vont transmettre leurs données à une intelligence artificielle, laquelle va décider en quelques centièmes de seconde si oui ou non un·e joueur·euse se trouve en position de hors-jeu.

Enfin, une nouvelle technologie vient encore d’être intégrée pour les fautes de main. En effet, le ballon possède à présent un capteur qui, lorsqu’il est touché, émet un signal. Ce dernier est analysé par une IA spécialisée qui va détecter s’il s’agit de la main d’un·e joueur·euse. Dans ce cas, l’arbitre est averti et peut siffler faute. Nous avons pu en faire la douloureuse expérience très récemment, lorsque le but des Belges a été annulé face à la Slovaquie lors de la première journée de la phase de groupe de l’Euro 2024 – On avait pourtant dit qu’on n’en parlait plus.

Mais le football est loin d’être le seul sport à voir la technologie lui offrir un sérieux coup de pouce. En gymnastique par exemple, une intelligence artificielle a été intégrée pour venir en aide aux juges sportifs. Lancée lors des Championnats du monde de Stuttgart, elle a été utilisée pour trancher lors de contestations sur les notes données, ou lors d’écarts jugés trop importants entre ces dernières. Et si ce sont bien les humain·es qui ont le dernier mot, il est déjà discuté de pouvoir intégrer l’IA comme une juge à part entière dans les compétitions à venir.

En tennis, les arbitres sont pour leur part carrément en voie de disparition. La raison, c’est Hawk-Eye, le sobriquet donné à l’intelligence artificielle désormais intégrée à tous les matches de compétition de haut niveau. Là encore, c’est sur deux niveaux que le système fonctionne. Le premier est composé d’un réseau de caméras placées stratégiquement tout autour du terrain. Le second, c’est une IA qui, en un éclair, juge la position de la balle et définit si cette dernière est dans les limites ou non du terrain. Contrairement aux juges de ligne humain·es, Hawk-Eye ne commet tout simplement aucune erreur, et aucune contestation n’est plus possible. De ce fait, dès 2025, cette “profession” historique disparaîtra des courts de tennis.

À la recherche de la nouvelle star

Mais si l’arbitrage est un des points sur lesquels la technologie s’intègre de manière impressionnante, il y a un autre secteur qui n’est pas en reste, c’est celui du “scouting”. Ce terme définit la recherche dans tous les sports des athlètes ayant suffisamment de potentiel pour devenir les stars de demain. Kevin De Bruyne, Justine Henin, Nafissatou Thiam ou encore Remco Evenepoel. Toutes ces stars belges du sport, qui gravitent ou ont gravité au sommet des classements mondiaux, ont été à un moment ou un autre repérées par des observateurices venu·es écumer les pistes d’athlétisme, les courts de tennis, les terrains de foot ou encore les courses organisées localement dans notre petit pays.

Des scouts, comme on les appelle, qui, pendant des décennies entières, ont été celleux qui ont su voir en de jeunes athlètes en herbe les générations de champion·nes que nous connaissons. Mais si leur travail est incroyable, il est clair que ces observateur·rices ne peuvent être partout et ne peuvent pas juger à 100% du potentiel de chaque jeune qu’iels ont scruté. Ce qui fait dire à de grand·es spécialistes qu’il est probable que de nombreux autres prodiges n’ont pas été détecté·es à temps, et n’ont donc pas pu percer.

Et une fois de plus, c’est à l’intelligence artificielle qu’il est demandé de faire le travail. Et cela grâce notamment à la vidéo. En filmant les rencontres ou les compétitions qu’iels vont voir, les scouts peuvent ensuite faire visionner ces centaines, voire milliers d’heures par un algorithme spécialement entraîné pour ce faire. Ce dernier, en se basant par exemple sur l’évolution des statistiques des athlètes déjà à leur meilleur niveau, va pouvoir faire des comparaisons avec les performances des athlètes et joueur·euses filmé·es.

Déjà utilisé par de nombreux clubs et fédérations sportives, ces moyens nouveaux permettent d’investir dans de potentielles nouvelles stars en diminuant les risques sur les investissements réalisés. Et ce n’est encore que le début, car ces IA possèdent une fonction de “learning” qui leur permet d’apprendre encore et toujours à chaque nouvelle analyse et chaque nouvelle décision qui est prise. Le potentiel de tels systèmes est donc tout simplement vertigineux.

La santé des athlètes scrutée au microscope digital

Parce qu’elles peuvent avoir un lourd impact tant sur la carrière des athlètes que sur les pertes financières des clubs ou fédérations qui les emploient, les blessures et autres complications médicales sont au cœur des développements liés aux nouvelles technologies. Celles-ci se centrent principalement sur la prévention.

Pour cela, les intelligences artificielles qui sont développées vont analyser un très grand nombre de données. Celles-ci vont être à la fois sur le long terme, comme l’historique des blessures et les informations biomécaniques et physiologiques des athlètes tout au long de leur carrière. Elles peuvent être aussi basées sur des moments donnés, comme des actions ou des situations statistiquement définies comme étant potentiellement à risque d’engendrer une blessure. Enfin, elles peuvent être ancrées dans l’immédiateté, en observant par exemple les gestes d’un·e athlète en plein effort et en détectant de potentiels mouvements anormaux des articulations de ce·tte dernier·e.

L’ensemble de ces recueils de statistiques et de ces observations vont ensuite permettre aux algorithmes de définir les diagnostics les plus probables en cas de douleurs ou de pépins physiques, ainsi que de proposer spontanément des types d’entraînements, d’étirements voire des processus de revalidation les plus adaptés.

Une révolution là aussi, qui risque de changer très fortement la donne dans les années qui viennent.

Une nouvelle façon de vivre le sport

On l’a compris, pour les athlètes comme pour les structures qui les emploient, l’IA est une alliée devenue absolument incontournable. Mais elle l’est tout autant pour les fans et les amateurices qui aiment suivre leur équipe ou athlète préféré·e. Car si le sport est aujourd’hui une industrie qui pèse des centaines de milliards d’euros, c’est aussi et avant tout grâce à l’engouement qu’il suscite au niveau mondial. Et si, tant médiatiquement parlant que sur les réseaux sociaux, le sport est déjà omniprésent, son traitement et sa façon d’être diffusé pourraient aussi drastiquement évoluer à l’avenir.

Quelques exemples ? Commençons par la diffusion des événements sportifs en direct. Pour cela, l’intelligence artificielle va rendre l’expérience des fans plus immersive en fournissant des statistiques en direct, des mises à jour sur les scores, des graphiques de performance des joueur·euses et des informations sur les blessures.

Mais plus encore, elle sera également capable d’offrir aux spectateurices le choix de décider de l’angle de caméra qu’iel veut choisir. Voire, d’ici quelques années (ou mois), à l’aide d’un casque virtuel, de pouvoir vivre en direct le ressenti d’un·e joueur·euse sur le terrain.

En termes de contenus aussi, une fameuse révolution s’amorce déjà. L’intelligence artificielle va en effet être de plus en plus utilisée pour grandement améliorer l’expérience des fans lors d’événements sportifs. Elle permettra de créer des contenus plus personnalisés et engageants en analysant les préférences et les interactions des fans.

Par exemple, un service de streaming sportif pourra recommander des matchs ou des événements basés sur l’historique de visionnage des spectateurices, ou générer des analyses en temps réel pertinentes pour leurs intérêts. L’IA pourra aussi analyser les expressions faciales, les commentaires et les réactions des fans pendant un match pour mesurer des émotions telles que l’excitation ou la déception, et adapter l’expérience en temps réel. Enfin, elle pourra proposer des recommandations de produits ou des offres spéciales en fonction des données des fans. De quoi faire franchir une étape supplémentaire à un business déjà gigantesque.

L’organisation en ligne de mire

Enfin, l’intelligence artificielle va également être mise largement à contribution dans le cadre de l’organisation des événements sportifs. L’un des grands laboratoires de l’intégration de cette nouvelle technologie sera les Jeux Olympiques qui commenceront dans quelques jours à Paris.

Parmi les secteurs qu’elle couvrira, il y aura la sécurité de ces événements, un enjeu essentiel. Un algorithme sera notamment utilisé avec des caméras de surveillance pour observer d’éventuels mouvements de foule ou des comportements inhabituels. Mais de manière plus globale, l’IA servira aussi à prédire les mouvements des visiteur·euses pour éviter les congestions et améliorer la circulation lors des périodes les plus chargées. Elle permettra aussi de planifier les itinéraires des transports en commun et de gérer en temps réel le nombre de navettes requises pour fluidifier les déplacements des dizaines de milliers de personnes venues assister aux exploits de leurs équipes et athlètes préféré·es.

Au niveau des systèmes de billetterie, l’IA pourra aussi lutter efficacement contre le recel et la contrefaçon des tickets d’entrée, en utilisant entre autres la reconnaissance faciale comme méthode de vérification secondaire. Elle permettra enfin de guider, via des applications en réalité augmentée, les visiteur·euses au travers des dédales que peuvent être les grandes enceintes sportives.

Il y a encore beaucoup à dire, tant les champs d’action dans lesquels l’intelligence artificielle va révolutionner le sport sont nombreux. Sans compter également les nombreuses solutions qui sont en cours de développement ou encore en phase de réflexion. Et à ce niveau, avec Sports Tech Belgium, la Belgique se positionne clairement avec l’ambition de devenir, pourquoi pas, un géant de ce secteur au potentiel tout simplement gigantesque.

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